Né à la Ville-Aslin en Ploubalay, le 2 février 1880, Jean-Baptiste Ruault vivra d'abord longtemps sur l'île des Ebihens avant de débarquer à Saint-Jacut. Grâce à sa forte personnalité il allait bien vite devenir une figure remarquable du village.
A l'âge de deux ans il est venu s'installer sur notre «p'tite île», ses parents, Jean-Baptiste Ruault et Marie Juhel ayant obtenu de la famille Peynaud, de Saint-Malo, les places de fermiers des Ebihens.
En raison de son statut d'îlien, il n'allait pas tous les jours à l'école, qui était alors située au coin de la Grande Rue et de la rue de la Manchette. Ce n'est pas pour autant qu"il passait ses longues journées à flâner sur les plages de sable blanc. Dès l'âge de 5 ans, il conduisait les chevaux avec son père et participait, dans la mesure de ses petites forces, aux durs travaux de la ferme. Sa soeur Marie, quant à elle, était pensionnaire chez les religieuses de l'Abbaye.
Les soirs d'hiver, il apprenait avec les douaniers basés dans la petite maison située au-dessus du port de la Chapelle, à faire des paniers en osier ou chèvrefeuille, petis et grands. Son père devait mener une lutte acharnée contre les lapins, grands grignoteurs de plates-bandes. Les repas s'en ressentaient et le mère de famille ne savait plus à quelle sauce les accomoder.
Jean-Baptiste Ruault vécut ainsi trente ans sur l'île. Le 12 septembre 1908, il épousa Ernestine Bourges qui travaillait à Saint-Malo chez les propriétaires * de la ferme et venait donc régulièrement avec eux passer les vacances dur l'île des Ebihens. Le jeune couple s'installa alors à Saint-Jacut après la naissance de leur deuxième enfant, Jean, né sur l'île, tout comme sa soeur Ernestine.
Arrivés sur la presqu'île ils louèrent pour l'exploiter l'Hôtel des Bains, l'actuelle boulangerie Denoual. Jean-Baptiste s'occupait aussi de mener les voyageurs à leur destination au moyen d'un attelage de chevaux. Ce fût d'abord un char à bancs, puis une victoria et enfin un omnibus. Tout cela nécessitait quatre chevaux régulièrement renouvelés, parmi lesquels Andalouse la baie et Poupée la blanche furent les plus mémorables. De la traction animale, Jean-Baptiste devait passer bien vite à l'automobile, car le 28 Juillet 1914 la préfecture des Côtes du Nord lui délivrait sous le N°16177 un permis de transport en commun. Il venait en effet de satisfaire à l'examen obligatoire de «bonne conduite» qui se passait en ce temps là à Dinan, à l'abri et à l'ombre du château de la Duchesse Anne, mais aussi sur les pavés qui partout recouvraient les rues de la ville, et mettaient à rude épreuve les médiocres suspensions de l'époque.
Quelques jours plus tard, bien qu'ayant été exempté de service militaire, Jean-Baptiste fut appelé à combattre durant la première guerre mondiale. Blessé par un fragment d'obus, il fut soigné à Saint-Malo. Vers la fin du conflit on lui confia un poste d'ambulancier, ce qui le mena sur le front pour y chercher les blessés.
A son retour il acheta un camion militaire déclassé, qu'il transforma en y plaçant deux banquettes intérieures et une galerie sur le toit. Il s'en servit alors pour conduire les commerçantes de Saint-Jacut au marché, le jeudi à Dinan et le samedi à Plancët. D'autres véhicules devaient se succéder par la suite pour cet usage, dont en dernier lieu une vieille «traction avant Citroën».
L'été, avec l'aide de deux ou trois chauffeurs, il organisait des excursions vers Dinard, le Cap Fréhel ou le Mont Saint Michel. Pour les besoins de l(hôtel, il cultivait également trois beaux jardins afin de disposer de légumes frais pour sa clientèle.
Surnommé Jean de l'Ebihen, Jean-Baptiste Ruault fut élu au conseil municipal sans se présenter. Il fut également le premier chef du corps de sapeurs-pompiers, créé à sa demande. Le jour des régates il dressait dans la cour de l'hôtel un mât de cocagne garni de lots enveloppés de papier. Il fallait les toucher pour les gagner, après avoir triomphé dans l'ascension d'un mât préalablement bien savonné.
Aux Ebihens, Jean-Baptiste avait appris de son père à aider les vaches lors d'un vélage difficile. C'est pourquoi les fermiers de Saint-Jacut venaient le chercher pour les assister quand cela se présentait mal chez eux. Grand chasseur il aimait à parcourir les terres de sa soeur, devenue Madame Duchêne, lorsqu'il disposait d'un dimanche libre. Lièvres, lapins et perdrix le redoutaient ! Quant aux bernaches, oies et courlis, il ne leur restait plus qu'à voler avec méfiance lorsque la chasse au gibier d'eau ouvrait. Son plus gros trophée fut un sanglier qu'il abattit entre le Châtelet et Lancieux. Il avait dû ce jour-là embarquer sur un doris pour venir à bout de la bête. Ramenée à l'hôtel sa dépouille fut exposée dans la remise où tout le pays défila pour l'admirer !
Jean-Baptiste Ruault est décédé à l'âge de 82 ans, laissant ses quatre enfants, ses quinze petits-enfants et proches dans un état de profonde tristesse.
Jean-Baptiste Ruault et Ernestine Bourges son épouse
Photo 1 : Marie Juhel épouse Ruault (mère de Jean-Baptiste) dans sa ferme des Ebihens.
Remerciements : ces lignes ont pu être rédigées grâce aux souvenirs de Maria Tréguier, fille de Jean-Baptiste Ruault.
En 1867 Adolphe-Louis Peynaud ( 1805-1881 Architecte & Industriel) fait l'acquisition de l'île.
En 1891 une maison y est construite, très certainement par son fils Edouard-Emile Peynaud ( 1846-1917 Armateur).
Edouard-Emile a 4 enfants dont Yvonne Peynaud (1904-1991) mariée une première fois à André Ernest Gautier
puis à Roger Eugène Causeret (1891-1979) .